Entre gel, grêle, pluie et mildiou, les vignes du Thouarsais n’ont pas été épargnées cette année. Des épisodes de plus en plus marqués et fréquents.
« Du mildiou comme jamais ». C’est le titre qu’a choisi le mensuel professionnel La Vigne pour son numéro du mois d’août. Avec en plus de ça un dossier sur la récolte des vignes gelées, difficile d’en douter : les viticulteurs français passent un été difficile. Dans le Thouarsais, si les professionnels du secteur ne sont pas les plus à plaindre, ils n’en sont pas moins impactés. "Ça a été une année un peu atypique", avoue Emmanuel Lacroix, sur son exploitation de Bouillé-Loretz. "On a commencé par le gel en avril, puis on a eu de la grêle en juin, avec des températures assez basses et une pluviométrie importante."
Du 1er mai au 13 août, il est ainsi tombé 256 millimètres d’eau sur les vignes de Bouillé-Loretz, et pas moins de 300 sur celles de Saint-Macaire-du-Bois. Soit presque la moitié de ce qui tombe habituellement sur toute une année. Des conditions favorables au développement des maladies de la vigne. "Il a fallu être vigilant au mois de juin, au moment de la floraison", explique Emmanuel Lacroix. "On a des tâches de mildiou sur les feuilles. Ce qui est important, c’est de sauver la grappe, parce que quand la maladie l’atteint, c’est foutu, la grappe sèche".
Lire aussi. Thouarsais : le président du Syndicat viticole intercommunal compte sur un été indien
Si le viticulteur essaie habituellement de traiter le plus tard possible, en jouant avec la météo, les pluies importantes ne lui ont guère permis ce luxe cet été. Sans pour autant aller dans l’excès : si d’autres pluies ne viennent pas lessiver les vignes, et si le producteur s’arrête là dans ses traitements, il n’en aura réalisé qu’un de plus qu’en 2020.
Par ailleurs, températures basses et gel obligent, les vendanges vont se faire attendre. "Depuis quelques années, on vendange de bonne heure à cause du réchauffement climatique", raconte Emmanuel Lacroix. "En 2020, on avait commencé autour du 1er septembre pour le chardonnay. Cette année, ce sera entre le 15 et le 20 : on revient sur des années normales."
Gel et grêle impactent la récolte
Les épisodes météorologiques extrêmes de cette année vont avoir des conséquences directes sur les récoltes. "Avec le gel, tous les bourgeons sortis de trois ou quatre centimètres ont gelé", raconte Emmanuel Lacroix. "Et les contre-bourgeons [qui ont poussé après la perte des premiers N.D.L.R.] donnent moins de raisins. On estime que la récolte sera inférieure de 50 % par rapport à une année normale." La grêle aussi a laissé des marques, qui pourraient se faire ressentir davantage sur le long terme.
Le « couloir de grêle » qui s’est abattu sur 400 mètres de large dans les vignes du domaine Lacroix le 19 juin dernier a déchiqueté les grappes qui étaient formées et laissé des plaies sur le bois de taille. "On va avoir un impact sur deux ans, parce qu’il va falloir qu’on trouve une solution pour la taille : on ne va pas pouvoir plier les baguettes [long bois laissé sur le cep après la taille pour porter les fruits N.D.L.R.] comme on le fait habituellement, parce qu’elles risqueraient de se casser", explique Emmanuel Lacroix.
« Une conséquence du changement climatique »
À Mauzé-Thouarsais, sur le domaine de La Roche Lambert, Sébastien Prudhomme estime de son côté à 20 ou 30 % sa perte de récolte. Un tiers des 30 hectares de son vignoble a gelé en avril. "Ça devient récurrent", fait remarquer le viticulteur. "Avant, on avait quelques dégâts, moins importants et plus espacés, comme en 1991, 1994 et 2007. Mais ces dernières années, on a eu des dégâts de gel en 2016, 2017, 2019 et 2021, soit quatre années sur six. Pour moi, c’est une conséquence du changement climatique. On se retrouve avec des épisodes de plus en plus marqués et qui durent."
Face à l’urgence climatique, les viticulteurs tentent de s’adapter. Emmanuel Lacroix a ainsi commencé il y a trois ans à implanter des couverts végétaux entre ses plants de vignes pour aérer la terre, et est passé cette année de l’usage d’intrants au désherbage mécanique. Mais Sébastien Prudhomme et lui s’accordent pour dire que les méthodes douces qui existent aujourd’hui sont imparfaites. Pour le désherbage mécanique, les deux viticulteurs ont recours à toute une panoplie d’outils à accrocher à un tracteur, n’ayant pas trouvé un outil qui puisse faire un travail satisfaisant à lui seul. "On améliore la qualité de l’eau en n’utilisant pas d’herbicides, mais on émet du CO2 avec le fuel du tracteur qui sert au désherbage mécanique", regrette Sébastien Prudhomme. "On résout une partie du problème, mais on en crée d’autres."