Les vendeurs de rue, qui vivent au jour le jour de la vente de leurs denrées, sont confinés chez eux et ne peuvent plus gagner de quoi vivre. Et risquent, à terme, de mourir de faim.
© (Photo Maryvone Delavault)
Ils sont désormais rares les pays encore épargnés par le coronavirus. Et depuis peu, c’est sur l’île de Madagascar que le Covid-19 a décidé de poser sa capside, arrivant avec des voyageurs par avion. « Si seulement les vols avaient pu être interdits, les Malgaches auraient pu passer au travers… », regrette Maryvone Delavault, présidente de l’ONG Solidarité-Entraide-Fraternité (Sef) franco-malgache. Malheureusement, le mal est fait et l’ancienne colonie insulaire française a pris des dispositions, en demandant le confinement de la population dans la capitale et le principal port du pays, tandis que les écoles et les universités sont fermées. Une situation qui inquiète Maryvone Delavault à plusieurs titres.
« Je crains qu’il y ait davantage de morts à cause de la faim que du coronavirus. » Certes, le pathogène risque de faire des ravages dans un pays aux hôpitaux mal équipés, et surtout où les soins sont payants, et donc réservés aux plus favorisés. « Et puis peu de gens ont une assurance santé. » Au point qu’il est probable que le nombre réel de victimes soit difficile à recenser. Mais rester enfermé chez soi, pour beaucoup, c’est risquer de mourir de faim. « Il y a beaucoup de gens qui vivent au jour le jour, en vendant de la soupe ou d’autres produits de première nécessité sur le bord des routes. Ceux-ci n’auront plus aucune rentrée d’argent. Pareil pour les étudiants enfermés dans leurs chambres dans la capitale, loin de leurs familles, souvent pauvres. D’autant que sur les marchés, les prix de nombreux aliments ont été multipliés par dix. Selon les rumeurs locales, le citron et le gingembre auraient des vertus curatives. Et puis les supermarchés sont beaucoup trop chers pour la plupart des habitants. » En tout cas, depuis l’île les appels au secours sont légion. « On reçoit beaucoup de sollicitations, des appels à l’aide tous les jours. Il ne faudra pas que ça dure très longtemps pour eux », s’inquiète Maryvone Delavault. Car malheureusement, elle assiste impuissante à cette détresse. « C’est très dur de se sentir si dépourvue par rapport à l’aide alimentaire qu’on ne peut envoyer à tout le pays. » Néanmoins, la présidente de l’ONG a assuré son assistance aux villages qu’elle aide habituellement en cas de besoin. « Il nous reste un peu d’argent qui était voué à d’autres projets, mais il y a désormais d’autres priorités », glisse-t-elle, en préparant déjà d’y aller dès que possible. « C’est terrible, je suis inquiète, mais je suis dans la lutte, et c’est ce qui me permet de tenir. » Et aux Malgaches de garder un peu d’espoir et de ne pas se sentir livrés à eux-mêmes…
Maryvonne DELAVAULT. Nouvelle République du 26/03/2020