Dans la Nouvelle République du Samedi 4 Avril :
Les deux salles d’attente de la maison médicale du boulevard de Thouars à Bressuire sont vides. Une situation exceptionnelle devenue habituelle depuis le confinement. Les quelques patients qui en passent la porte sont systématiquement invités à se laver les mains et les médecins les accueillent masqués. La guerre est déclarée. On est ici dans un poste avancé.
"Nous n’assurons plus que 30 à 50 % de notre activité habituelle", estime le Dr Jean-Louis Jarry. "Certains patients ont peut-être peur de venir et de croiser des porteurs du coronavirus mais nous avons aussi libéré notre agenda. La téléconsultation compense en partie. Nous recevons quand même nos patients atteints de pathologies chroniques. Souvent, ils profitent de ces rendez-vous pour évoquer de nouveaux problèmes de santé. Il y a un risque que certains aient peur de venir et ne se plaignent pas, ce qui pourrait altérer leur prise en charge, mais nous appelons les gens que nous savons fragiles."
En première ligne, Jean-Louis Jarry et ses confrères voient arriver la vague épidémique qui a déjà touché de plein fouet d’autres régions. "Hier jeudi, 230 tests avaient été réalisés sur le nord Deux-Sèvres. 23 se sont révélés positifs, 7 personnes ont été hospitalisées dont une a été admise en réanimation à Niort et deux (une femme de 94 ans et un homme de 35 ans) sont sortis d’hospitalisation. Ce sont les premiers signes de cette vague. Mais nous n’allons pas forcément connaître la même situation que le Grand-Est ou l’Ile-de-France", lâche avec espoir le médecin bressuirais. "Si nous faisons attention, nous pouvons réussir à étaler cette vague en faisant en sorte que tout le monde ne soit pas malade en même temps. Cela semble fonctionner. On peut espérer que notre région bénéficie d’un confinement plus précoce que dans ces régions."
Nous n’allons pas forcément connaître la même vague que le Grand-Est ou l’Ile-de-France
Dr Jean-Louis Jarry, Médecin Bressuire
Si Jean-Louis Jarry a une connaissance aussi précise de l’avancement de la pandémie en nord Deux-Sèvres, c’est parce qu’il est le président de l’association du Pôle santé (devenue Communauté des professionnels du territoire de santé) du Bocage bressuirais. "Nous étions une centaine de professionnels de l’Agglomération du Bocage bressuirais membres de ce Pôle santé avant la crise et nous sommes environ 120 désormais."
Cette communauté de médecins, infirmiers, pharmaciens, sage-femme […] représente un maillage étroit du territoire déjà actif avant le confinement et encore plus depuis qu’il a été déclaré. "Nous avons l’habitude de travailler ensemble. Nous organisons deux webconférence chaque semaine, le mardi entre médecins et le jeudi avec tous les professionnels de santé. Nous échangeons aussi avec les médecins du CHNDS qui nous parlent des cas qu’ils rencontrent et nous conseillent."
Jean-Louis Jarry tire un premier enseignement de cette crise. "Ce lien entre professionnels de santé est important et fonctionne bien parce qu’il existait déjà." Mais surtout, il a permis d’organiser la lutte contre le Covid 19 sur le terrain. "Nous organisons des réunions à thème. Nous avons ainsi étudié l’opportunité de créer un centre de test au Covid 19 comme cela se fait sur Cholet. Finalement, nous y avons renoncé parce que 10 % des personnes testées se révèlent finalement positives. Nous aurions couru le risque de faire se côtoyer des personnes atteintes et d’autres qui ne l’étaient pas. Et puis, il nous a semblé que chaque médecin connaît ses patients et est le mieux à même d’évaluer leur santé."